Ciné-conférence Explorations dans la chaîne Trans Alaï, 3 février 2024, Forum des images, Paris 1er




1er septembre - Daroot Korgon


Nous sommes partis d’Och vers 8 h 30, direction Daroot Korgon. Nous traversons des paysages de montagnes de 3 000 à 4 000 mètres, pelées, de couleur jaune, et parfois rouge. De nombreux petits villages d’agriculteurs, aux maisons basses à un étage pour la plupart, encadrent notre route. Des troupeaux de vaches et de moutons, encadrés par des Kirghizes à cheval, déambulent nonchalamment sur les routes ; de bons coups de klaxon sont nécessaires pour se frayer un passage. La route, parfois accidentée, monte et descend des cols ; le dernier, qui s’élève à 3 615 mètres, avant la descente sur Sary Tash, offre de belles vues sur le pic Lénine au loin… souvenir de 1994. Nous aurons mis trois heures pour atteindre Sary Tash.

Sary Tash, 3 170 mètres d’altitude, est une petite bourgade, située à 186 kilomètres d’Osh, d’environ 1 500 habitants, dont le nom signifie pierre jaune. Elle est un carrefour de routes majeures, entre le Kirghizstan, le Tadjikistan et la Chine.

Au sud, après avoir traversé la vallée de l’Alaï, la route s’élève jusqu’à la passe Kuzulart, à la frontière avec le Tadjikistan. En 2014, ayant, par erreur, dépassé l’accès à la vallée Kichkesuu, nous avions été jusqu’à cette frontière, où nous avions dû faire demi-tour.

80 kilomètres à l’est se trouve la passe Inkeshtam, qui mène à Kashgar dans la province du Xinjiang.

Enfin, vers l’ouest, une route conduit jusqu’à la frontière tadjike, puis à Dushanbe, la capitale du Tadjikistan. C’est la route que nous avons empruntée, en nous arrêtant à Daroot Korgon. Elle longe la rivière Kuzul, dans la vallée d’Alaï. Cette dernière est située sur deux chaînes, celle de l’Alaï au nord, et celle du Trans Alaï au sud. Cette route offre, à notre gauche, au sud, des vues spectaculaires sur la chaîne du Trans Alaï, dominée par son sommet le plus élevé, le pic Lénine (7 134 mètres). Nous traversons, entre autres, les villages de Sary Mogul, Kara Kavak, et Kabyk.

Daroot Korgon, 90 kilomètres à l’ouest de Sary Tash, se trouve dans la région administrative d’Och. À son nord, une route était utilisée par les explorateurs pour relier Och, via la passe Tengizbay, (je n’ai pas réussi à savoir si elle est toujours empruntée), avant la construction de la nouvelle route.

Au sud, la vallée de la rivière Altyn Daria, au sein de laquelle nous allons nous engager demain. Elle mène à la frontière avec le Tadjikistan. Peu avant la frontière se trouve le village d’Altyn Mazar, où était installée une antenne de météorologie soviétique. Pour y accéder, il fallait passer par le nord ; par le sud, depuis le Tadjikistan, ce n’est pas possible, en raison notamment du gigantesque glacier Fedchenko.

Un explorateur et archéologue hongrois du XIXe et XXe siècle, connu pour ses découvertes archéologiques en Asie centrale, avait émis l’idée que Daroot Korgon était l’emplacement de la « Stone Tower ». Cette dernière était le nom (traduction de Lithinos Pyrgos en grec), donné par Ptolémée, au lieu où les caravanes, en provenance de Chine et de l’Empire romain, se rencontraient pour le commerce. Une théorie pas admise par tous — en fait quatre sites sont défendus par les spécialistes.

Nous logeons dans une auberge vétuste, mais agréable, où nous partageons un dortoir.

Je rencontre des scientifiques allemands, notamment des géologues, qui passent trois semaines dans le coin, et logent aussi dans l’auberge. Ils m’expliquent qu’ils étudient la plaque tectonique entre l’Inde et l’Eurasie, plus précisément sa partie ouest, qui est située dans la vallée d’Alaï où nous nous trouvons. Ils étudient l’évolution de cette plaque qui avance de quelques centimètres par an.

Précision : la plupart des images ci-dessous sont des captures d’écran, sur mon PC, de vidéos. Elles n’ont pas la qualité de photos.