Ciné-conférence Explorations dans la chaîne Trans Alaï, 3 février 2024, Forum des images, Paris 1er




2 septembre - Camp de base


Nous quittons l’auberge, les propriétaires sont très accueillants. Nous achetons du pain au bazar du village. Dans l’attente de sa livraison, j’assiste aux premières heures du matin au village. Aujourd’hui, c’est la rentrée des classes. Des enfants, accompagnés pour les plus petits par leur mère, se dirigent vers leur école. Ils sont habillés d’un uniforme, pantalon bleu et chemise blanche, les filles ont la tête ornée de décorations blanches. Tous portent la joie de vivre sur leurs visages. 

Nous quittons Daroot Korgon, et empruntons, durant deux kilomètres, la route qui conduit à la frontière tadjike. Puis, nous nous engageons sur une piste, direction plein sud, rassurés d’avoir pu la trouver. Deux kilomètres plus au sud-est, nous nous arrêtons à un poste-frontière, où des militaires vérifient nos laissez-passer et nos passeports. La caserne paraît relativement importante. Vérifications faites, tant nos papiers que l’intérieur du véhicule, nous traversons la caserne, seul moyen de rejoindre un pont sur l’Altyn Daria, et de traverser cette rivière. 

Les cartes soviétiques, ainsi que les cartes spatiales, montraient de multiples pistes, et je ne parvenais pas à déterminer un itinéraire. Sur une application GPS qui m’a été conseillée, et que j’ai téléchargée sur mon portable 15 jours avant le départ, un seul itinéraire est présenté. Nikolaï a d’ailleurs une application équivalente qui propose aussi cet itinéraire. Nous poursuivons notre piste, accidentée par moments, avec des franchissements de rivières, mais très correcte dans l’ensemble. Une des interrogations était de savoir si les cours d’eau seraient franchissables,  et ils le sont sans difficulté par notre 4X4, habilement piloté par Sacha. À un moment, petite erreur de piste, mais nous corrigeons rapidement. Nous croisons des troupeaux de chevaux, de moutons, et de bovins, et longeons des champs de pommes de terre. 

Et, deux heures après notre départ, nous apercevons l’entrée de la vallée Bel Uluu. Enfin !

Je suis heureux, et aussi rassuré, il faut l’avouer, que l’on soit parvenu sans problème à ce point d’intersection des rivières Altyn Daria et Bel Uluu. Lorsque je préparais l’expédition sur les cartes, j’avais de grosses incertitudes. Mais, par chance, l’application GPS que j’ai connue tardivement (d’habitude j’utilise uniquement les cartes), 15 jours avant mon départ, s’est montrée parfaite. Et je suis heureux de pouvoir ainsi découvrir, dans la réalité, cette vallée Bel Uluu ; jusqu’à présent, je la connaissais uniquement sur les cartes soviétiques et sur les cartes spatiales de Google Earth.

Nous trouvons un emplacement superbe pour le camp de base, au bord de la rivière Altyn Daria, certainement déjà utilisé par les nomades kirghizes ou des militaires. Nous installons les tentes, une grande tente pour les repas, où je dormirai, et une petite tente individuelle pour Nikolaï ; quant à Sacha ; il dormira comme d’habitude dans son véhicule qu’il a aménagé en conséquence. J’avais souhaité que l’on ne soit que deux, Nikolaï et moi-même, mais il est impératif qu’il y ait quelqu’un pour assurer la garde du bivouac, en raison notamment de la présence de nomades. Avec le recul, la présence d’une troisième personne est nécessaire, d’autant plus que Sacha est une personne vraiment sympathique et débrouillarde.

Notre camp installé, nous prenons un café. Deux militaires se présentent, ils engagent la discussion avec Nikolaï et Sacha. Bilan : ils nous demandent de quitter l’emplacement et de trouver un lieu plus au nord à environ 800 mètres. Le lendemain, une unité militaire kirghize viendra s’installer sur cet emplacement. 

Bref, on démonte tout, on recharge dans le véhicule, on trouve un autre emplacement, situé sur une prairie, agréable aussi, mais petit inconvénient, la rivière se trouve à dix minutes de marche.

Je peux contempler l’accès à la vallée Bel Uluu. Elle se divise, à son extrémité ouest, en deux vallées. La vallée du glacier Bel Uluu au nord, et, à son sud, une autre vallée plus petite : voir carte sur la page Préparation expédition. J’aperçois au loin le sommet glaciaire de la petite vallée du Sud, jamais gravi, pas d’altitude mentionnée sur les cartes. 

Nous nous trouvons au sein de paysages à la fois grandioses et paisibles, de prairies apaisantes aux couleurs jaunes et orangées, dominées par des montagnes rocheuses, ou plutôt rocailleuses, plutôt arides, aux couleurs qui mélangent le gris et le brun, et qui changent dans la journée suivant l’orientation du soleil. Au loin, dans les hauteurs, on distingue des faces glaciaires, principalement orientées au nord. Une interrogation d’importance pour notre projet : quelles sont les conditions de neige et de glace sur ces faces et couloirs, compte tenu des chaleurs qui règnent dans le coin en cette fin de saison estivale ?

Précision : les images ci-dessous sont des captures d’écran, sur mon PC, de vidéos. De ce fait, elles n’ont pas la qualité de photos.